Le jour de repos fait le plus grand bien,. C'est l'occasion de recharger les accus sans oublier de soigner la monture. Le vélociste me dit que c'est la première fois qu'il voit une "Brooks" cuir sur un vélo de course. Si ça donne un look particulier, c'est tout confort pour mon fessier !
Cette doublette est avant tout motivée par des questions logistiques : elle évite un retour Strasbourg Périgueux avec emballage des vélos et un transfert de gares à Paris, suivi du voyage en sens inverse une autre année, soit deux jours de galère.
Seul Philippe m'accompagne, David n'ayant pu se libérer pour des raisons professionnelles.
Jocelyne joue les St Bernard : elle vient nous chercher à l'hôtel à 7h30 et nous emmène au commissariat d'où nous partons à 8h. Elle nous accompagnera sur une vingtaine de kilomètres. Tophe a choisi de son côté de nous accompagner jusqu'à Neuf Brisach.
Surprise : le vent annoncé favorable est en réalité contre nous. Heureusement il est faible.
A trois, les relais passent bien dans la plaine d'Alsace. Le premier arrêt est programmé à Diebolsheim, BPF du 67, où l'on poste la traditionnelle carte postale du départ.
Quelques kilomètres avant Neuf Brisach Tophe, malade, nous laisse partir. A bientôt l'ami, dés la fin du mois pour un séjour Cent Cols à St Dié.
A notre droite, la ligne bleue des Vosges prend toute sa signification. A gauche la Forêt Noire lui fait face. Par contre, nous ne verrons pas le Rhin pourtant si proche.
A Neuf Brisach nous profitons de l'arrêt BPF pour prendre un verre car la température s'élève.
L'arrêt déjeuner se fait à Cernay. C'est là que débutent les premières difficultés de cette diagonale. Il en sera ainsi jusqu'à Baume les Dames où nous empruntons une petite route qui suit le cours du Doubs.
Cette trentaine de kilomètres jusqu'à Besançon, terme de cette première étape est pour moi un instant de pur bonheur. L'absence de voitures permet de mettre tous les sens en éveil : le soleil décline et de nouvelle senteurs apparaissent. Les kilomètres s'enchaînent comme par enchantement.
Le lendemain dès le départ à 5h30 le ciel est brouillé. Il noircit peu à peu, ne laissant rien présager de bon. C'est après Arc et Senans, vers 7h que les éléments se déchaînent. Dès les premières gouttes, les coups reçus sur le casque sont sans équivoque. C'est de la grêle qui tombe au milieu de seaux d'eau. Nous nous réfugions sous l'avant-toit d'un garage. Hospitaliers, les habitants de la maison nous font signe de rentrer nous mettre à l'abri et nous offrent le café. Le logement, vieillot, est très modeste ; l'eau goutte du plafond, c'est l'alerte générale pour éponger !... C'est avec soulagement que nous quittons nos hôtes dès que l'intensité de la pluie baisse car il nous reste encore beaucoup de route à parcourir.
Il continue de pluvioter jusqu'à Arbois. C'est dommage car les vignobles sont tristes, parsemés de fumerolles.
Un fois sur le plateau jurassien le soleil revient avec en prime du vent favorable. Au vu des réserves de bois omniprésentes, on sent que les hivers y sont rudes. Le contrôle de Baume les Messieurs permet de faire une pause bienvenue.
Le ciel se recouvre lors de la traversée de Lons le Saunier. C'est en haut de la côte qui suit que le deuxième orage de la journée se déclenche. Un abri-bus va faire l'affaire pour s'épargner pluie et bourrasques de vent. Nous accusons désormais une bonne demi-heure de retard sur la feuille de route. Rien de dramatique dans un tel contexte d'autant que la météo est annoncée plus clémente pour l'après-midi. Le repas de midi servi avec célérité nous permet de regagner un peu de temps.
Le soleil revient peu à peu et nous roulons bon train vers Neuville / Ain.
Après ce contrôle, Philippe commence à donner des signes de faiblesse. S'il à toujours du mal à « remettre en route » après un arrêt, là c'est plus inquiétant car il n'accroche pas, même sur des relais peu appuyés, alors qu'il est sur son terrain favori. Un arrêt BPF à Crémieux permet de se ravitailler. Je demande à Philippe de rester dans la roue pour le soulager. Las, il me fait part de son souhait d'arrêter près de L'Isle D'Abeau. C'est la première fois que je vis un abandon sur une diagonale, un instant spécial où la séparation se fait brutalement. A l'inverse, c'est une motivation supplémentaire pour aller au bout.
Je continue bon train sur Vienne où le ciel se charge. C'est tout d'abord un crépitement de flashes ensuite accompagné de grondements de tonnerre. Le déluge s'abat sur Roussillon où je m'engouffre dans la pizzéria qui, par chance, me fait face à ce moment là. Je dîne en attendant que les abats d'eau se calment. Par chance c'est chose faite une fois le dessert avalé. Il ne me reste plus qu'à gagner tranquillement l'hôtel réservé à Chanas.
Le lendemain la descente de la vallée du Rhône se déroule sans accroc. Un léger vent favorable me permet de gagner une demi-heure sur la feuille de route.
Les cigales se font entendre bruyamment à partir de La Voulte. La journée va être chaude. Quel contraste avec la veille dans le Jura ! C'est là le charme des diagonales : passer en 24h de la montagne du Jura à la Provence et la Méditerranée.
Après le déjeuner à Bagnols sur Céze, l'après-midi va se passer à courir les cimetières pour changer l'eau qui chauffe dans le bidon en un quart d'heure.
L'arrivée sur Montpellier est mouvementée. Un aménagement urbain m'a envoyé sur le trottoir. Dans un virage en S ma roue avant ripe sur le sol glissant et c'est la catastrophe : je perds le contrôle du vélo et finis ma course contre des boîtes aux lettres : un vrai destin d'ex postier ! Bilan de l'accident : une oreille qui saigne et le coude éraflé et enflé pour moi, la selle, la sacoche de selle désaxées et la roue avant qui touche le frein. Le diagnostic plus approfondi est rassurant : pas de problème pour moi et le vélo roule normalement après avoir joué des clés allen même si le dérailleur est encore légèrement déréglé.
La traversée de la ville est chaotique car ma trace se perd dans un tunnel interdit aux vélos. Après la traversée d'un parc je me retrouve finalement place de la Comédie et tout rentre dans l'ordre.
Passé Montpellier le vent est désormais de face. La route est vallonnée jusqu'à Marseillan malheureusement sans vue sur l'étang de Thau puis plus facile jusqu'à Agde.
La dernière journée est à la fois courte et facile. La navigation n'est toutefois pas aisée jusqu'à Coursan car j'ai programmé de petites routes pour éviter Béziers et emprunter la N9 le plus tard possible.
Le dernier contrôle à Narbonne me permet de me ravitailler. Jean-Pierre, un copain des 100 cols, m'attend à la sortie de la ville. Sa présence me fait chaud au cœur et me permet de rallier le commissariat de Perpignan sans hésitation.
Cette double diagonale, une première pour moi est une belle satisfaction. Il ne me reste désormais plus qu'à réussir Hendaye Menton pour conclure le cycle des neuf diagonales.
Etude de parcours Gilbert JACCON : cliquer ici